MAUVAISE CONSCIENCE

 

Avant propos :

 

Le présent article a pour objet de préciser en quoi les phénomènes de mauvaise conscience et d’angoisses sont différents l’un de l’autre et combien il est important de savoir les distinguer pour comprendre le message de la somatisation.

La bonne règle veut qu’un phénomène soit étudié dans son entier, à savoir de sa manifestation commençante jusqu’à la dégénérescence extrême.

Evoquer les situations de déchéance et d’addiction ne veut donc pas dire que l’on se complait dans le trash, mais que le phénomène est suffisamment connu pour être pisté jusqu’en sa phase ultime.

 

De plus, il nous apparaissait intéressant ici de montrer comment deux choses différentes peuvent en arriver à se confondre lorsque les frontières entre intérieur et extérieur sont abolies

 

Si nous voulons parler de la mauvaise conscience,  nous devons la distinguer de sa proche cousine l’angoisse.

 

Vues de loin, angoisse et mauvaise conscience peuvent se ressembler, mais dès lors que l’on s’intéresse de plus près à leurs natures respectives, ce qui les différencie devient flagrant.

Ceci dit, à un certain degré elles peuvent en arriver à fusionner et devenir semblables, mais nous verrons alors dans quel cas et sous quelles conditions.

 

La différence principale tient en ce que la mauvaise conscience prend ses racines dans le monde de l’intériorité, elle est une sensation privée qui ne nous concerne qu’individuellement ; 

Tandis que l’angoisse, au contraire, naît de notre environnement, elle est une sensation liée à notre commerce avec le monde.

Même si nous la ressentons à titre personnel,  même si elle peut aller jusqu’à nous habiter et nous envahir,  l’angoisse ne naît pas de nous et dépend d’un mode collectif situé hors de nous-même.

Le plus souvent, le monde collectif dont il est question est celui de l’univers familial, puis plus tard, celui de l’environnement social.

 

La mauvaise conscience est un renseignement sensoriel donné par l’instinct.

Notre instinct analyse en continu la façon dont nous nous déterminons par rapport au monde et par rapport à nous-même.

S’il advient que l’harmonie de l’être se brise, une dissonance désagréable se fait jour.

La rupture d’harmonie dont il est question ici est celle qui découle d’une transgression envers notre nature dans son aspect moral, émotionnel, affectif ou sensuel, ou bien encore d’une trahison que nous commettrions envers la vie au sens large.

 

C’est le ressenti  de cette dissonance qui porte le nom de mauvaise conscience.           

 

S’il advient que nous fassions le choix de rester insensible à cette alerte, indifférent aux conséquences de cette rupture d’harmonie  et  totalement sourds à nos rêves, les instincts montent alors d’un cran l’intensité du message et le rende explicitement constatable  par somatisation.

Ce type de somatisation n’est pas un symptôme,  il s’agit de l’expression insistante d’un message  dont les manifestations précédentes, plus subtiles et exclusivement émotionnelles sont demeurées incomprises ou non suivies d’effet.

 

Il est intéressant de poser à ce stade les deux grandes familles de somatisations.

 

1) La somatisation liée à la mauvaise conscience, somatisation ou le corps se fait messager pour porter plus explicitement une information incomprise jusqu’alors.

Cette somatisation n’est ni un symptôme ni une conséquence mais un mode de communication voulu par la psyché qui le juge comme devenu indispensable.

 

2) La somatisation liée à une atteinte extérieure anxiogène (l’angoisse), somatisation qui atteint le corps si la conscience ne perçoit pas la menace ou n’entame aucune action pour protéger l’être.

 

 

Dans ce cas, par contre,  la somatisation est bel et bien  la conséquence d’une souffrance psychique, elle est bien le symptôme d’une insécurité, d’une carence,  d’une menace, d’une maltraitance subie par la psyché.

Sur le plan analytique, le fait de ne pas savoir, pouvoir, ou vouloir faire le distinguo entre la mauvaise conscience et l’angoisse, entre le langage et le symptôme, entre l’exprimé et le subi,  peut devenir la source de graves malentendus et conduire à de funestes erreurs de diagnostic……  

 

Pour continuer et finir sur la mauvaise conscience, le fait de persister encore et encore et  de ne pas écouter ses sensations, ses rêves, son corps,  peut conduire à des situations extrêmes d’effacement de soi avec perte de sens et errance. 

D’errances en errances, à ne plus s’écouter,  à ne plus se considérer, on tend, en bout de course, à ne plus vraiment se sentir exister.

C’est lorsque la notion d’individu n’éveille plus aucun écho en nous et ne trouve plus aucune parcelle de conscience pour se réaliser qu’est atteint le point de non-retour, à savoir le reniement, l’oublie  de nous-même et de ce qui nous constitue.

C’est à ce niveau extrême, étant devenu extérieur à nous-même et de fait dépourvu d’intériorité connaissable, que la mauvaise conscience confine à l’angoisse et se confond avec elle puisqu’il n’y a plus ni intérieur ni extérieur mais juste un chaos impersonnel.

 

Les facettes de notre déchéance peuvent alors prendre des teintes multiples et variées ; Elles peuvent aller de la clochardisation pour les personnalités les plus délitées, aux addictions majeures, à la grande dépravation en passant par les fanatismes les plus obstinés pour les personnalités toujours debout mais sous influence totale.

 

L’aiguillage vers le fanatisme ou les addictions se faisant alors au grès des circonstances et des fréquentations.